espositions à la galerie
féminité(s)
du 28 septembre au 28 novembre 2022
démarche
« une émotion, donc un trait ; un trait dans la tête, ou sur une feuille, ou sur mon ipad; dans la tête le plus souvent, un trait que je transfère sur la toile, et qui devient ce que j’appelle respectueusement un gribouillon; c’est à dire des traits plutôt ronds, mais surtout très libres et qui vont vers l’essentiel.
c’est ainsi que, [quand je suis] dans mon atelier, l’enregistrement dans mon cerveau de toutes mes émotions me donne envie d’exprimer au pinceau des formes qui surgissent de manière automatique. [ensuite], je joue ensuite avec les couleurs qui sont en moi pour composer une toile. je travaille par à-coups et très vite ; je reprends mes toiles, qui n’aboutissent généralement qu’au bout de plusieurs mois ; je travaille presque toujours sur plusieurs toiles à la fois.
quand je commence une toile, je n’ai pas d’idée précise ; je ne fais que m’adapter à ce que produisent mon pinceau et mon subconscient ; je suis juste le correcteur de ce qui s’est imprimé.
une toile révèle donc mon rapport au monde, ce que j’en ressens et ce que j’en pressens. une fois la toile terminée, libre à celui qui la regarde de créer sa propre histoire, raison pour laquelle je n’aime pas imposer un titre. [»]
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la puissance
de la joie
Quand j’ai rencontré Florence la toute première fois, c’était dans un aéroport. On partait à Venise, où l’on participait toutes les deux à une exposition. Florence Grenot une première fois, c’est une force de physique, de couleurs, de chaleur qui vous arrive en pleine face. Rien n’attend, tout se donne. C’est offert, et explosif. C’est instantané. Le voyage à Venise fut le début d’une rencontre magistrale et d’une longue amitié.
La peinture de Florence, c’est comme Florence. Offert et explosif. Pleine face. On rentre dedans, on s’en met plein les mains, plein les yeux, plein les sens. Grands plans colorés, choix chromatiques intenses, gestuelle instinctive, tourbillon d’expressions.
Car il faut la voir travailler. Florence Grenot, si elle ne travaille pas, elle ne vit pas en totalité. Si elle travaille, elle danse. Sa création est une danse. Une danse chamanique. Toile, pinceaux, couleurs, tout s’emmêle et c’est son corps à elle qui donne le rythme. Il y a là la mer de l’Atlantique qui déboule, grosse vague blanche et iodée, à portée de main, ici les grands pins drômois torturés par le vent et roses intenses au coucher du soleil, les églises et les maisons blanches de Vendée, posées, imposées, tendues comme des arcs, des fleurs qui s’emballent en bouquets comme des feux d’artifice, des femmes à l’oeil noir comme des rocs qui vous scrutent ou vous narguent. A chaque fois, à chaque travail, à chaque toile, Florence Grenot se lance sur le support, l’écrabouille, le violente, commence, recommence. Quitte à devenir toile elle même tant la peinture se plait à venir et revenir tacher son corps à elle. A la voir faire, oui, il y a du ballet, un pas de danse intime, entre elle et ce qu’elle cherche à faire, qui n’est jamais gagné d’avance, et au prix de nombreux doutes.
Faire, refaire, détruire, et recouvrir, parce qu’on n’aime pas assez, qu’on est insatisfait, qu’on a peine à rendre la fugacité du sentiment qu’on explore, douter et puis trouver. C’est cette frénésie à trouver qui rythme sa danse. Dans sa quête, pas toujours comblée, l’abstraction n’est jamais loin. On y tend, on la veut, la main libère la matière et les traits, et même si le thème est défini, Florence cherche jusqu’à s’épuiser la fulgurance du ressenti et la spontanéité du geste.
Au bout du chemin, parfois tourmenté, toujours généreux, la puissance de Florence sait vous embarquer dans son monde coloré, et il y a de la joie à partir en peinture avec elle.
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Sophie mandrillon
artiste peintre